À l heure où l on sonnait l eucharistie, une masse noire, compacte s était rassemblée sur le quai des Belges de Marseille. Il était 10 h 45, en ce dimanche 3 octobre 43. Comme des coups de fusil, des ordres claquèrent... Still gestanden ! (Garde à vous !) Dans la seconde qui suivit, 180 paires de talons s entrechoquèrent. Les hommes de la SS-Pz-AA10, tout de noir vêtus, se figèrent dans une immobilité de marbre sous leur lourd casque d acier jetant une ombre menaçante sur leur jeune visage, les rendant plus dur encore. Das Gewehr... über ! (Arme sur l épaule) Dans un même mouvement, 180 fusils « Mauser » montèrent et se calèrent au creux de leur épaule gauche. Auf gleichen Schritt, marsch ! (En avant, marche !) La compagnie SS de reconnaissance s ébranla au pas de parade. Leurs bottes luisantes, cloutées de fer se mirent à marteler en cadence le pavé marseillais, faisant jaillir des étincelles ; derrière eux, dans un cliquetis inquiétant, d autres suivaient dans des tenues entièrement camouflées, armes lourdes en travers de l épaule et bandes de cartouches autour du cou. Plus d un Marseillais comprit, à cet instant en les voyant passer, qu avec ceux-là, la fin devait justifier les moyens et que le verbe « s arranger » n aurait plus cours ; avec eux, arrestations, déportations et exécutions allaient s abattre sur quiconque n avait toujours pas accepté la défaite ou, compris qui étaient les nouveaux maîtres de la cité phocéenne !